Cette semaine dans notre analyse Ondes de Choc : le changement climatique veut-il votre mort ? L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) veut-elle vous appauvrir ? Et nous nous penchons sur les appels à la réforme de l’ONU qui se font de plus en plus pressants.
ACTUALITES
Défi de communication : Le changement climatique est en train de « nous tuer », préviennent les Nations Unies. Plus précisément, il tuera 250 000 personnes par an, en raison de la hausse des températures, de la pollution atmosphérique, de l’insécurité alimentaire et hydrique et des catastrophes naturelles. Il plongera 132 millions de personnes dans la pauvreté d’ici à 2030 et entraînera le déplacement de 1,2 milliard de personnes d’ici à 2050. L’envoyé spécial de l’Organisation mondiale de la santé pour le changement climatique et la santé n’a pas mâché ses mots pour désigner les coupables : « c’est l’utilisation des énergies fossiles qui est à l’origine du changement climatique qui est en train de nous tuer ». C’est peut-être la raison pour laquelle les Émirats arabes unis, qui accueillent cette année la conférence mondiale sur le changement climatique et qui est un important exportateur de pétrole, a fait appel à des professionnels des relations publiques de la compagnie pétrolière nationale pour les aider à organiser la conférence sur le climat. Ou peut-être ont-ils décidé qu’il fallait sauver la face étant donné que le pays est membre de l’OPEP, qui a fait gonfler les prix du pétrole, contribuant à alimenter des niveaux d’inflation inquiétants à l’échelle mondiale. ¯\_(ツ)_/¯
De l’essence et un ras-le-bol : La hausse de l’inflation entraîne une crise du coût de la vie, suscitant un mécontentement et des tensions dans toute l’Afrique. Les prix des carburants s’envolent dans la région : le prix du litre de diesel a bondi de près de 12 % ces dernières semaines à Nairobi, en raison de la réduction de la production de l’OPEP, de la dépréciation de la monnaie et de l’augmentation des taxes. Le shilling kenyan s’est déprécié de 20 % par rapport à l’année dernière, ce qui rend les achats plus coûteux. De même, les prix du diesel ont augmenté de 10 % ce mois-ci en Tanzanie, poursuivant une tendance à la hausse entamée en janvier. La flambée des prix a contribué à alimenter l’escalade des tensions économiques au Ghana, qui ont débouché sur des manifestations ayant conduit à l’arrestation de 49 personnes.
Prendre le pouls : 86 % des agents de santé locaux en Afrique ne sont absolument pas rémunérés. Vous avez bien lu : 86%. Non rémunérés. Et les 14 % seulement qui sont payés le sont souvent très mal. Ce personnel fournit des soins de base à plus d’un milliard de personnes dans le monde. De récentes manifestations au Kenya ont permis de débloquer de petites indemnités pour 100 000 femmes travaillant dans le secteur de la santé, mais de graves lacunes en matière d’emploi (et de soins) persistent dans tout le pays. Les femmes représentent 70 % du personnel de santé dans le monde, mais elles n’ont souvent pas accès à des salaires justes, à des postes de direction ou à des diplômes médicaux supérieurs.
Lutter pour l’égalité de genre : Bilan, le premier média somalien exclusivement féminin, s’apprête à étendre ses activités au-delà de la capitale du pays, Mogadiscio. L’équipe fournit une couverture unique de la vie et des opinions des femmes depuis un an. Leur travail est particulièrement important en Somalie, pays le plus dangereux d’Afrique pour les journalistes et qui affiche l’un des taux d’égalité de genre les plus bas au monde. À la suite des sécheresses dévastatrices qui ont frappé la Somalie en 2021, on estime que les taux de violences sexiste ont augmenté de 200 %. Ce phénomène s’inscrit dans le cadre d’un défi plus large auquel les femmes sont confrontées sur l’ensemble du continent. Elles sont souvent attaquées lorsqu’elles entrent dans la sphère publique, ce qui conduit nombre d’entre elles à fuir le monde politique. C’est pourquoi 30 femmes parlementaires de toute l’Afrique se sont récemment réunies en Tanzanie pour discuter de la violence en ligne à l’encontre des femmes journalistes, des candidates et politiciennes du continent.
Une goutte d’eau : Le directeur général de la Banque mondiale, Ajay Banga, a déclaré que les ressources actuelles de la Banque n’étaient qu’une goutte d’eau dans l’océan par rapport aux besoins du monde. Il a déclaré que les nouvelles contributions des pays riches et les changements de bilan pourraient augmenter la capacité de prêt de la Banque mondiale de 100 à 125 milliards de dollars sur une décennie. C’est un bon début. Mais les banques multilatérales de développement pourraient mobiliser 1 000 milliards de dollars supplémentaires grâce à d’autres réformes structurelles, notamment en améliorant leur gestion du risque. La Banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (BAII) annoncera cette semaine son intention de tripler ses financements en faveur du climat d’ici à 2030, afin de s’imposer comme un leader du système financier international. Espérons que cela déclenchera une course au sommet parmi les banques multilatérales de développement. 📈
Le changement, c’est maintenant : Les présidents kenyan William Ruto et congolais Félix Tshisekedi réclament un siège africain permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. Ils se joignent à un groupe de plus en plus nombreux qui réclame une réforme de cet organe composé de cinq membres permanents (plus dix membres tournants), qui s’est enlisé dans des manœuvres géopolitiques. Le Brésil, l’Allemagne, l’Inde et le Japon (le « G4 ») ont promis de travailler ensemble pour réformer l’institution. Mieux vaut ne pas retenir son souffle : la réforme nécessiterait l’approbation des cinq puissances disposant d’un droit de veto (Chine, France, Russie, Royaume-Uni et États-Unis) et des deux tiers des 193 membres de l’ONU. Les changements de pouvoir à l’ONU sont extrêmement lents comparé à ce qui se passe dans le reste du monde. La France se prépare à retirer ses troupes du Niger, marquant ainsi une nouvelle perte d’influence dans ses anciennes colonies africaines. Le Kenya, quant à lui, va jouer un rôle de premier plan sur la scène internationale en acceptant de diriger une mission de police internationale en Haïti.
Justice pour les disparus : Le Nigeria compte plus de la moitié des personnes disparues en Afrique. Les militants locaux affirment que le gouvernement est responsable de la « disparition » de milliers de personnes par le biais d’exécutions extrajudiciaires et d’arrestations arbitraires. Le gouvernement nigérian a huit ans de retard dans la mise en place d’une base de données nationale des personnes disparues. Ce retard est récurrent pour le gouvernement : il a présenté un rapport aux Nations unies sur l’élimination des disparitions forcées en 2021, soit neuf ans après la date butoir. Ça ne semble pas être une bonne méthode pour gagner la confiance des citoyens. Pas plus que la récente arrestation d’une Nigériane à la suite de son post sur les réseaux sociaux affirmant qu’une pâte de tomate « a un goût sucré ». 👀
L’ÉQUIPE DE ONE EN ACTION :
- Aux côtés de 16 autres organisations, nous signons une tribune pour dénoncer la décision du gouvernement français de repousser de 5 ans l’atteinte des 0,7 % du RNB alloué à l’aide publique au développement. Derrière ces pourcentages, ce sont au bas mot 11 milliards d’euros qui ne seront pas disponibles pour apporter une aide cruciale aux populations les plus vulnérables.
- A l’approche du vote du projet de loi de finances 2024, nos jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices s’apprêtent à passer deux jours à l’Assemblée nationale les 9 et 10 octobre prochains pour demander aux député-e-s d’augmenter les financements pour la solidarité internationale. Certain-e-s député-e-s n’ont pas encore répondu à leurs sollicitations, nous avons donc besoin de votre aide ! Cliquez sur ce lien pour leur envoyer un mail et leur demander de recevoir nos bénévoles.
LES CHIFFRES :
- Moins de 12% des orateurs de haut niveau à l’Assemblée générale des Nations Unies cette année étaient des femmes. 🤦♀️
- Un seul prêt sur les 32 accordés par le FMI entre mars 2020 et mars 2023 et comprenant des mesures d’austérité a évalué l’impact sur le revenu réel des personnes.
- 20 des 30 pays qui ont restreint l’accès à internet au cours des trois dernières années sont africains.