Cette semaine, dans notre analyse Ondes de Choc : l’énorme potentiel de croissance de l’entrepreneuriat africain, le pouvoir des industries créatives et la récente victoire du gouvernement nigérian.
ACTUALITES
Contre-Forum : Le Forum Global Gateway de cette semaine à Bruxelles qui fait suite au forum de l’initiative « des nouvelles routes de la soie » de la semaine dernière à Pékin. Les présidents des Comores (actuellement président de l’Union africaine), de Namibie, de Mauritanie, du Sénégal et de la Somalie se sont rendus à Bruxelles pour l’occasion. Le Cap-Vert, la République démocratique du Congo, l’Égypte, le Maroc et le Rwanda ont envoyé leurs Premiers ministres. A l’inverse, les dirigeants des grands pays européens ont décidé que ce n’était pas une priorité et n’y ont pas fait le déplacement. Cela pourrait aggraver les frustrations croissantes des dirigeants africains qui estiment que l’Occident ne les considère pas comme des partenaires égaux. Parmi ceux dont l’absence a aussi été remarquée : le président de la Banque mondiale, Ajay Banga, et le président sud-africain, Cyril Ramaphosa. Ondes de Choc est depuis longtemps critique de cette initiative de l’Union européenne pour son manque de substance, mais il semblerait qu’un travail de réflexion soit en train de se faire. La Commission européenne a signé des accords bilatéraux sur les minéraux rares, l’hydrogène vert, des accords numériques et des corridors de transport. Consultez ici une carte des projets.
8 fois plus de santé : Le Nigeria a remporté son procès devant la Haute Cour britannique concernant un contrat gazier. Si le Nigeria avait perdu, le gouvernement aurait dû verser une somme 8 fois supérieure au budget fédéral de la santé du pays à un petit groupe de chefs d’entreprise et à un fonds spéculatif enregistré aux îles Caïmans. Cette victoire est énorme étant donné son impact sur les dépenses gouvernementales. Les dépenses par habitant en matière de santé au Nigeria s’élèvent à seulement 70$ par an. 75 % de cette somme sont à la charge des citoyens, le gouvernement couvrant seulement 15 % et les donateurs internationaux 10 %.
Doublement des dépenses : La consommation des personnes d’ascendance africaine dans le monde augmentera presque de moitié d’ici 2030, passant de 910 milliards de dollars en 2019 à 1 700 milliards de dollars en 2030, selon l’Institut McKinsey pour la « Mobilité Noire » (Black Mobility). Cela équivaut à plus de la moitié du PIB actuel de tout le continent africain. La diaspora africaine – qui compte 160 millions de personnes à travers le monde – a envoyé 55 milliards de dollars sur le continent en 2023. Pour comparaison, l’aide à l’Afrique s’est élevée à 58,4 milliards de dollars en 2021. Cet argent permet de couvrir le coût de la vie de plus de 200 millions de personnes. Le gouvernement ghanéen, qui a fait appel à la diaspora pour dynamiser son économie, n’a pas manqué cette information.
Meta analyse : La demande mondiale crée également un marché important pour les entrepreneurs africains. La plateforme en ligne ANKA, qui vise à « libérer l’entrepreneuriat africain à l’échelle mondiale », affirme que 30 % de ses acheteurs sont issus de la diaspora africaine et 40 % sont d’origine africaine-américaine ou caribéenne. Beaucoup utilisent des applications pour atteindre leurs clients : 40 % utilisent WhatsApp et 37 % utilisent Facebook ou Instagram. Cela signifie que Meta, le groupe qui détient ces trois plates-formes, facilite environ 77 % des ventes en ligne des entrepreneurs africains.
Visas dans le viseur : Une analyse du LAGO Collective – une nouvelle plateforme visant à libérer le pouvoir des industries créatives face aux défis mondiaux – montre que les Africains demandant des visas européens sont plus susceptibles de se heurter à un refus. Pour les visas américains, l’attente moyenne pour obtenir un entretien d’admission sur le territoire est de 492 jours pour les Nigérians, 455 jours pour les Ougandais et 375 jours pour les Ghanéens. En témoignent les refus de visas opposés à des artistes africains de renom : les associés de l’artiste écossais-ghanéen Lesley Lokko, qui a organisé la Biennale de Venise cette année en ont fait les frais. Des documents provenant de l’ambassade italienne à Accra indiquaient qu’il existait « des doutes plausibles quant à l’intention des artistes de quitter la région ou l’État avant l’expiration de leur visa », ce qui a entraîné leur rejet.
Géants africains : En 2022, l’Afrique subsaharienne a été le marché de la musique à la croissance la plus rapide au monde, selon la Fédération internationale de l’industrie phonographique. Cet été, Burnaboy a rempli le stade de Wembley à Londres. Pourtant, même les plus grands artistes africains montants ont du mal à obtenir des visas pour se rendre en Europe et en Amérique du Nord, selon Don Jazzy, gestionnaire de la musique afrobeats, qui a travaillé avec des artistes primés. Ce sont pourtant de jeunes artistes très créatifs avec beaucoup de fans et un énorme potentiel. Mais nombre d’entre eux sont aussi de jeunes hommes africains ayant peu de ressources financières et sont donc considérés comme un « risque » dans le cadre des règles actuelles en matière de visa.
Le livre noir : Trois ans après le massacre #EndSARS, un nouveau thriller Netflix exposant la brutalité policière au Nigeria a fait sensation dans le monde entier. « The Black Book » a été vu 5,6 millions de fois 48 heures après sa sortie et a figuré parmi les 10 premiers films visionnés dans 69 pays. « Les films sont faits pour le public, et plus le public d’un film est grand, plus les chances que votre message soit diffusé sont grandes. La réalité pour nous est que nous avons réalisé un film, fait par des Nigérians, financé par de l’argent nigérian, et il a conquis le monde » , a déclaré le producteur Editi Effiong. « The Black Book » fait partie d’une moyenne de 2 000 films produits chaque année au Nigeria. Nollywood est la deuxième plus grande industrie cinématographique du monde en termes de nombre de productions, après l’Inde.
Lithiumisation : Le Ghana est sur le point de devenir l’un des principaux producteurs mondiaux de lithium suite à un accord avec la société minière australienne Atlantic Lithium Ltd. L’accord de 15 ans est une aubaine pour le Fonds souverain du Ghana, qui acquerra une participation de 3,06 % dans l’entreprise. La société raffinera le minerai au Ghana, ce qui lui apportera de la valeur ajoutée, créera des emplois et produira 3,6 millions de tonnes de concentré de spodumène. Il s’agira du dixième plus grand projet de lithium au monde.
Approbation officielle : Le Fonds monétaire international (FMI) a fait savoir qu’un nouvel instrument de capital hybride de la Banque africaine de développement (BAD) est conforme à ses règles sur les caractéristiques d’actifs de réserve des droits de tirage spéciaux (DTS). Ces règles visent à empêcher les gouvernements d’imprimer de la monnaie et de l’utiliser pour leurs propres budgets. La proposition de la BAD vise à utiliser les DTS du FMI pour prêter à bon marché aux gouvernements africains. Il ne s’agit que d’une expérimentation, mais cela pourrait changer la donne car elle utilise les DTS selon un ratio de 1 pour 4. Si les 375 milliards de DTS inutilisés dans les pays avancés étaient injectés, cela pourrait débloquer 1 500 milliards de dollars.
F comme… : Le Système de Surveillance des Crises Alimentaires Précoces (FEWSNET) avertit que le phénomène El Niño provoquera une insécurité alimentaire accrue en 2024. Les impacts précédents d’El Niño en 1982, 1983, 1997, 1998 et 2014 ont provoqué de graves sécheresses en Afrique, la mort du bétail, des pertes de récoltes, des incendies de forêt, des foyers d‘épidémies. Les sécheresses historiques dans la Corne de l’Afrique ont déjà provoqué de graves pénuries d’eau et d’insécurité alimentaire pour des dizaines de millions de personnes.
L’ÉQUIPE DE ONE EN ACTION :
- La directrice France de ONE, Najat Vallaud-Belkacem, revient sur les enjeux des dernières assemblées annuelles du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale qui se sont déroulées du 9 au 15 octobre au Maroc dans une tribune pour L’Obs.
- Il y a deux semaines, nos jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices ont rencontré une vingtaine de députés pour leur demander de soutenir un renforcement de l’aide publique au développement lors du vote du Projet de loi de finances. Dans cet article, nous vous racontons comment se sont déroulés ces rendez-vous et ce qui en est ressorti.
LES CHIFFRES :
- 100 % : Le pourcentage de chances qu’ont les entrepreneurs africains sur Internet de réaliser une vente si un produit a été mis à jour récemment.
- 98 % : La probabilité qu’au moins une des cinq prochaines années soit la plus chaude jamais enregistrée, selon l’Organisation météorologique mondiale.
- 5 : Le nombre de pays africains disposant des installations nécessaires à la production de vaccins : Afrique du Sud, Égypte, Maroc, Sénégal et Tunisie.