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Cette semaine dans Ondes de Choc : nous mettons en lumière les principales annonces faites lors des réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI qui se déroulent à Washington.
ACTUALITES
La prison des débiteurs : La Chine aurait renoncé à impliquer les créditeurs multilatéraux (comme la Banque mondiale et le FMI) dans le processus d’allègement de dette, levant ainsi un obstacle majeur aux négociations en cours sur la dette des pays en difficulté. En contrepartie, la Chine a reçu l’assurance que les institutions multilatérales fourniraient de nouveaux financements concessionnels, y compris des dons, aux pays dont la dette est en cours de restructuration. Cette nouvelle fait suite à un nouveau rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) qui met en avant l’impact de la différence de notation de crédits de l’Afrique. Ce que l’on appelle la « prime africaine » s’élève à 74,5 milliards de dollars en intérêts excédentaires et financements perdus. Cela représente 12 % de plus que le total de l’aide au développement allouée à l’Afrique en 2020. Sept pays africains consacrent plus de 25 % de leurs recettes publiques au paiement des intérêts de leur dette. Pendant ce temps, les experts mettent en garde contre une « crise du développement » due à la dette qui pourrait faire retarder le développement des générations futures, les gouvernements étant obligés de sacrifier les services sociaux pour financer les remboursements de la dette.
La pente glissante : Le FMI avertit que la persistance de l’inflation, associée à des taux d’intérêt plus élevés, augmente considérablement les risques d’un « atterrissage brutal » de l’économie mondiale. Selon le FMI, il y a 15 % de risques de récession mondiale et 25 % de risques que la croissance ralentisse à un niveau rarement atteint depuis 1970. L’institution prévoit actuellement une croissance économique mondiale de 2,8 % cette année et une hausse à 3 % en 2024. L’inflation mondiale devrait passer de 8,7 % en 2022, à 7 % en 2023 et à 4,9 % en 2024, mais se révèle « plus tenace que prévu ».
Des objectifs propres : Selon une analyse récente de ONE, des niveaux records d’aide au développement sont dépensés dans leur pays d’origine, ce qui compromet les efforts de lutte contre l’extrême pauvreté. En 2022, l’aide au développement a atteint un montant record de 204 milliards de dollars, soit 13,6 % de plus que l’année précédente. Une bonne nouvelle, non ? Pas vraiment : 29,3 milliards de dollars, soit 14,4 %, n’a jamais quitté le territoire des pays donateurs. En conséquence, l’aide publique au développement bilatérale pour les pays africains a diminué de plus de 7 % l’année dernière. Or, nombre de ces pays doivent faire face aux menaces climatiques, à la famine, au surendettement et aux pandémies.
Redistribution des droits : Le G24, qui contribue à garantir que les pays à revenu faible et intermédiaire soient représentés dans les conversations sur le financement du développement, a demandé plus de voix et un troisième siège pour les pays d’Afrique subsaharienne au FMI, ainsi qu’un rééquilibrage des quotes-parts en faveur des pays à revenu faible. Le groupe a également appelé les pays riches à fournir les 100 milliards de dollars de droits de tirage spéciaux (DTS) qu’ils ont promis en 2021 et de les acheminer par l’intermédiaire des banques multilatérales de développement. Il manque 35 milliards de dollars aux pays riches pour honorer leur engagement, bien que les ministres des finances du G7 aient (une fois de plus) réitéré leur soutien à la réallocation des DTS vers les pays les plus pauvres. Le gouvernement français prévoit d’appeler ses homologues à réorienter au moins 30 % de leurs DTS vers les pays vulnérables et en fera une priorité du sommet qu’il accueillera en juin en partenariat avec l’Inde. À ce propos, une nouvelle étude suggère que la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, s’est peut-être trompée en affirmant que l’UE n’était pas en mesure de réallouer ses 200 milliards de dollars en droits de tirage spéciaux (DTS).
L’esprit de réforme : Les appels à réformer les banques multilatérales de développement se font de plus en plus pressants. Cette semaine, plusieurs ministres africains des finances ont demandé que les financements de l’Association internationale de développement (AID) et de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) soient triplés. Le G24 a demandé à la Banque mondiale d’augmenter ses prêts aux pays à revenu intermédiaire en tirant mieux parti de son bilan. Enfin, 120 personnalités ont demandé à la Banque mondiale de mettre en œuvre un plan de réforme de l’institution en 10 points. Comme prévu, le Comité du développement de la Banque mondiale a annoncé mercredi une augmentation de 50 milliards de dollars sur 10 ans, par le biais de modifications du bilan de la Banque. Cela représente 0,2 % des 2 400 milliards de dollars que les pays à revenu faible ou intermédiaire devront dépenser chaque année d’ici à 2030 pour lutter contre le changement climatique. Le comité a également convenu de progresser sur plusieurs points : le retrait de la limite légale de prêt, l’optimisation du bilan de l’AID, la création d’une facilité de crise pour l’AID, l’optimisation du capital exigible et la réallocation des droits de tirage spéciaux (DTS). Tic-tac. ⏰
Fonds fiduciaire : La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, indique que 44 pays souhaitent bénéficier du soutien du fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité (RST) du FMI, et que sa capacité pourrait être amenée à augmenter pour répondre à une demande aussi forte. Elle a appelé les autres pays à se joindre à la France et à augmenter les engagements de réallocation de DTS à 30 %. Le RST a reçu 25 milliards de DTS (sur une capacité totale de 33 milliards de DTS). Parallèlement, le Fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et la croissance (PRGT) du FMI souffre d’un manque de financement de plus de 3 milliards de DTS. On s’attend à ce que certains pays prennent des engagements cette semaine : L’Arabie saoudite fournira 2 milliards de DTS au PRGT, tandis que l’Irlande s’engagera à augmenter ses subventions au PRGT. La Suisse indiquera qu’elle souhaite également contribuer au RST. 🎉
L’ÉQUIPE DE ONE EN ACTION :
- L’OCDE a publié mercredi les chiffres préliminaires de 2022 sur l’aide publique au développement, et si la tendance mondiale est alarmante, les efforts de la France sont à saluer ! Retrouvez ici l’analyse de Maé Kurkjian, responsable du plaidoyer chez ONE.
- Nous avons réagi dans L’Orient Le Jour suite à la publication des chiffres sur l’APD et au fait qu’elle ait atteint un niveau record avec la guerre en Ukraine.
- Plus d’une centaine de dirigeants politiques, d’activistes et d’économistes se sont réunis pour proposer un plan d’action en dix points visant à réformer la Banque mondiale et à l’adapter aux enjeux de notre siècle.
- Allez lire la tribune co-signée par ONE dans La Croix sur les effets dévastateurs du changement climatique sur les pays africains.
- Vous pourrez lire ici la tribune de Najat Vallaud-Belkacem, directrice France de ONE, sur le poison lent de la désinformation
LES CHIFFRES :
- 16 % des recettes publiques de 91 pays à revenu faible et intermédiaire de la tranche inférieure sont consacrées au remboursement de la dette, ce qui pousse les gouvernements à réduire les dépenses de santé et d’éducation.
- 4 à 5 millions de nouveaux travailleurs doivent être intégrés au marché du travail nigérian chaque année, ce qui n’est pas une mince affaire étant donné que le taux de chômage vient de dépasser les 40 %.
- 63 % des suspensions du service de la dette dans les pays ayant participé à l’initiative de suspension du service de la dette provenaient de créanciers chinois.