Cette semaine, dans Ondes de Choc : le prix du financement de la guerre en Éthiopie, l’hypocrisie de l’Occident concernant les combustibles fossiles, le protectionnisme en matière de sécurité alimentaire, et plus encore.
ACTUALITES
Bouleversement des budgets : Bien que les troupes fédérales et les rebelles éthiopiens aient déclaré une trêve à la guerre civile qui dure depuis un an et demi dans le Tigré, les créanciers internationaux du pays continuent de réduire leurs prêts. Les décaissements des banques publiques et privées sont en baisse de près de 75 %, passant de 3,1 milliards de dollars sur la période 2019-2020 à moins de 775 millions de dollars au cours des neuf premiers mois de l’année fiscale actuelle. Cela intervient alors qu’un soutien financier est absolument nécessaire : le conflit, associé à une grave sécheresse, a provoqué le déplacement de plus de 2,6 millions de personnes à l’intérieur du pays. L’ONU estime que le déficit de financement actuel est de 338 millions de dollars.
Alimenter l’hypocrisie : La guerre en Ukraine a révélé la dépendance persistante de l’Europe et des États-Unis à l’égard des importations des combustibles fossiles, malgré les appels mondiaux (dont les leurs) en faveur d’une transition vers les énergies renouvelables pour lutter contre le changement climatique. Mais alors que l’Europe se tourne vers l’Afrique pour pallier son approvisionnement en pétrole et en gaz russe, les banques de développement – dont la Banque Européenne d’Investissement et la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement – s’écartent du financement de projets de combustibles fossiles sur le continent, et les dirigeants et experts africains ont critiqué l’hypocrisie de l’Occident. Parallèlement, l’Égypte prévoit de profiter de la COP27 pour demander des comptes aux pays riches sur leurs promesses d’aider les pays pauvres à lutter contre le changement climatique.
Contre le grain : L’Ouganda a imposé des restrictions sur les exportations des denrées alimentaires et des céréales, et le Ghana a prolongé une interdiction temporaire d’exportation, émise pour la première fois en septembre dernier alors que la guerre en Ukraine continue de menacer la sécurité alimentaire partout dans le monde. Ils rejoignent une liste croissante de pays qui ont pris des mesures similaires pour protéger leurs marchés intérieurs, alors que près de 350 millions d’Africains sont touchés par la crise alimentaire. Les effets pourraient être désastreux étant donné qu’une grande partie des exportations du Ghana et de l’Ouganda sont destinées à d’autres pays du continent. L’Afrique est déjà confrontée à une pénurie d’approvisionnement puisque près de la moitié de son blé provenait de Russie et d’Ukraine avant la guerre. Pendant ce temps, les boulangers du Burkina Faso ont fermé leurs magasins pour protester contre l’interdiction faite par le gouvernement d’augmenter le prix du pain.
Faire passer le message : Les habitants de 26 communautés du Liberia ont menacé de s’installer dans les bâtiments du gouvernement et dans les logements des fonctionnaires, alors que les inondations et l’érosion marine continuent de rendre leurs propres maisons inhabitables. Cette protestation fait suite à l’inaction du gouvernement face aux inondations annuelles qui causent des dégâts se chiffrant en millions de dollars et font des victimes chaque année. Le meneur des protestations affirme que la corruption a conduit les fonctionnaires à ignorer les mesures de protection de l’environnement dans le domaine du bâtiment et de la construction. Les communautés demandent des solutions durables, notamment un plan de relocalisation et un projet de défense côtière.
Un intérêt croissant : Au cours des trois derniers mois, 60 hausses de taux d’intérêt ont été annoncées, et les experts mettent en garde contre un resserrement mondial de la politique monétaire. Bien qu’il s’agisse du plus grand nombre de hausses de taux depuis plus de 20 ans, les taux restent historiquement bas. Les changements les plus importants sont attendus aux États-Unis et au Royaume-Uni, mais l’effet d’entraînement se fera sentir en Afrique. Le Kenya a relevé ses taux d’intérêt de 7,5 % pour la première fois en sept ans en raison de l’inflation, des problèmes de chaîne d’approvisionnement et de la hausse des prix des matières premières.
Permis de tuer : Au moins 300 personnes ont été tuées au Mali par les forces maliennes et les membres du groupe Wagner, un groupe paramilitaire russe lié au Kremlin. Selon des témoins, la plupart des personnes tuées étaient des civils, mais le gouvernement a qualifié l’« opération » de succès, affirmant avoir tué 203 terroristes. Le gouvernement a nié la présence du groupe Wagner, qui opérerait également en République centrafricaine, en Libye, au Mozambique et au Soudan. Entre-temps, les analystes ont qualifié le renouvellement de la présence militaire américaine en Somalie de contre-mesure à l’influence croissante de la Russie en Afrique.
Voie rapide, voie lente : Le développement de vaccins contre le COVID-19 a pris un an – celui du vaccin contre le paludisme en a pris 35. En 2020, plus de 240 millions de cas de paludisme ont été recensés dans 85 pays. Depuis 2000, le paludisme a causé environ 15 millions de décès dans le monde, dont 94 % en Afrique. Le développement d’un vaccin contre le paludisme est compliqué car le virus évolue en trois étapes dans le corps humain. Pourtant, la protéine utilisée pour créer le vaccin a été découverte dans les années 1980, mais une attention et un financement insuffisants ont entravé les progrès de la recherche. Le contraste avec le développement (heureusement) rapide des vaccins contre le COVID-19 est… noté.
Sur la chaîne de production : La pandémie a multiplié les possibilités d’augmenter les capacités de production de vaccins en Afrique, avec 15 projets de production en cours. Cela pourrait signifier une multiplication par trois des capacités existantes. La capacité de production pourrait être étendue au-delà des vaccins contre le COVID-19, pour inclure la production locale de traitements contre le paludisme, la tuberculose et le VIH. Mais les progrès réalisés sont menacés : la demande est en baisse car « les gens ont cessé de considérer la vaccination contre le COVID-19 comme une priorité ». Sans production locale, l’Afrique risque de continuer à dépendre des pays plus riches en cas de nouvelle pandémie ou de variant du COVID-19. De plus, une étude récente du FMI a révélé que jusqu’à 75 % des retards de livraison de vaccins aux pays à revenu faible étaient dus à des retards dans les accords d’achat.
L’ÉQUIPE DE ONE EN ACTION :
- ONE s’est associé à Theophilus Abbah et Daniel Adaji pour analyser l’invasion de l’Ukraine par la Russie et comment cela menace la sécurité alimentaire du Nigeria.
LES CHIFFRES :
- 38 : le nombre de pays en situation d’insécurité alimentaire de niveau 3 ou supérieur, touchant plus de 135 millions de personnes.
- 11,7 millions : le nombre de cas de COVID-19 en Afrique, qui continue d’augmenter.
- 6 millions : le nombre de personnes en Somalie touchées par une sécheresse engendrant de la famine, ce qui représente près de 40 % de la population.