Ce billet a été adapté de l’anglais par Sixtine Doutriaux, assistante campagnes chez ONE France.
Je suis née et j’ai été élevé au Bénin (Afrique de l’Ouest) dans une famille très spéciale. Avec du recul, je réalise que mes parents étaient non-conformistes. Nous étions 10 frères et sœurs mais mon père a fait en sorte que nous allions tous à l’école, même s’il n’y avait qu’un seul salaire pour toute la famille. Malgré la pression exercée par la communauté de notre village, il a insisté pour que ses trois filles soient scolarisées. J’ai commencé très tôt à gagner de l’argent en tant que chanteuse et je ne comprenais pas pourquoi je devais continuer à aller à l’école. J’ai voulu abandonner mais mon père me l’a interdit : « Si tu veux vivre ici tout en continuant à chanter, tu dois finir l’école. Cela te permettra de comprendre le vaste monde qui t’entoure et de réaliser ton rêve d’être une chanteuse qui parcourt le monde ».
Je me souviens d’avoir été en colère à l’époque mais aujourd’hui je lui suis reconnaissante. L’enseignement que j’ai reçu était de haute qualité car les professeurs étaient eux-mêmes très instruits. A l’époque, on surnommait le Bénin « le quartier latin » de l’Afrique. Hélas les choses ont changé depuis. Mes études m’ont beaucoup apporté : cela m’a donné confiance en moi, non seulement pour chanter mais aussi pour prendre la parole sur les plateaux télé de la CNN ou de la BBC et pour rencontrer les dirigeants mondiaux pour plaider en faveur des droits des femmes en Afrique.
Lorsqu’en 2002 j’ai commencé ma mission d’Ambassadrice de bonne volonté à l’UNICEF, j’ai d’abord travaillé sur la campagne « Go Girl » visant à promouvoir l’accès à l’éducation primaire pour les filles. Beaucoup d’efforts ont été déployés et la campagne a permis d’accomplir des progrès dans ce domaine. Mais lors d’un voyage en Tanzanie, une maman m’a expliqué que l’accès à l’éducation primaire n’était plus suffisant. Pourquoi les filles devraient se contenter de ça ? Poursuivre les études jusqu’au collège permet aux filles de prévenir le mariage précoce à un âge crucial et d’acquérir des compétences qui impacteront l’ensemble de la société. A titre d’exemple, beaucoup de recommandations médicales ne sont pas toujours prises en compte par les mères faute d’éducation. Pour changer la donne, il faut des mères mieux instruites et cela aurait un impact non seulement sur elles mais aussi sur leurs familles.
Ma passion pour l’éducation des filles m’a incité à créer la Fondation Batonga qui lutte en faveur de l’accès à l’éducation secondaire des filles. Après des années de plaidoyer, j’ai le sentiment que de plus en plus de personnes à l’international soutiennent cette idée. Et ça me rend très heureuse. Mon rêve serait de voir chaque fille africaine avoir la même chance que moi et être en mesure de s’accomplir.
Mais notre travail ne peut pas s’arrêter là. Un grand obstacle existe face à ce rêve : il ne suffit pas de créer des écoles et d’y inscrire des élèves ; les filles (et les garçons !) méritent une éducation de qualité. Nous manquons d’enseignants qualifiés. Le programme scolaire doit être souvent actualisé afin que l’on puisse préparer une nouvelle génération de jeunes filles à saisir les nombreuses opportunités qu’offre le 21e siècle en Afrique !
J’espère que vous êtes sensible à cet enjeu et que vous souhaitez en apprendre davantage sur l’accès à l’éducation secondaire de qualité pour les filles. 2015 est une année décisive et j’espère vraiment que Nkosazana Dlamini Zuma, la présidente de la Commission de l’Union africaine et Angela Merkel, la chancelière allemande travailleront main dans la main afin qu’une attention particulière soit accordée à l’éducation des filles et que les financements adéquats soient mis à disposition.
Si on donnait aux filles la chance d’apprendre, elles pourraient transformer l’avenir de l’Afrique.