© Vincent Jarousseau
Ce billet de blog a été rédigé par Lilia, Guillaume, Romane, Houda, Laila et Alice, jeunes Ambassadrices et Ambassadeur de ONE en France.
L’organisation d’un Sommet international sur les questions financières
Les 22 et 23 juin 2023, Paris a accueilli le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Ce rendez-vous d’importance cruciale visait à réunir les acteurs économiques et politiques capables de focaliser l’attention internationale et l’action interétatique sur les questions financières liées au développement international et au climat.
Ces deux thématiques sont intrinsèquement liées et revêtent aujourd’hui une importance vitale qui doit guider les décisions politiques actuelles et futures, en y incluant notamment les pays les plus vulnérables, déjà gravement affectés par la convergence des crises que nous traversons.
Les pays à faible revenu subissent déjà de plein fouet les conséquences de la crise climatique alors qu’ils en sont les moins responsables. C’est pour cela que les pays à revenu élevé, principaux pollueurs, doivent agir rapidement pour que les plus touchés puissent s’adapter.
Ces derniers mois, ONE, accompagnée de ses jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices, s’est mobilisée en amont du Sommet pour alerter et attirer l’attention sur ce déséquilibre injuste. Nous sommes convaincu·e·s qu’il est nécessaire de comprendre que ce n’est pas parce que les crises frappent à l’autre bout du monde qu’elles ne nous concernent pas. La pandémie nous a montré que la réalité est toute autre.
Notre message a été entendu jusque dans les plus hautes sphères décisionnelles. Face aux ministres ou à leurs équipes, ONE a délivré un message clair : le système financier mondial doit tenir compte des besoins spécifiques des pays à faible revenu en matière d’adaptation aux effets du changement climatique, de la crise de la dette et de la fragilité des services sociaux comme l’accès à la santé.
À la rencontre des ministères…
Car chez ONE nous pensons que les représentants politiques ne détiennent pas le monopole de l’action et la capacité de changer le cours des choses, les jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices n’ont eu de cesse de négocier dans les antres du pouvoir en amont de ce Sommet. Du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères (MEAE) à l’Elysée en passant par Matignon et Bercy, nous avons mis toutes les chances de notre côté pour s’assurer que la France défende une politique ambitieuse lors de cet événement de haut niveau. Entre autres, nos demandes s’orientaient principalement sur 3 points clés : la réforme des banques multilatérales de développement (BMD), la réallocation d’une partie des droits de tirages spéciaux (DTS) émis par le FMI durant la pandémie aux pays à revenu élevé vers les pays qui en ont le plus besoin, ainsi que le dégagement de nouvelles recettes liées à l’adoption d’une taxe internationale sur les transactions financières (TTF).
Dans un premier temps, les jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices de ONE ont été reçu·e·s par Chrysoula Zacharopoulou, Secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux, pour un échange instructif qui a duré plus de deux heures.
Quelques semaines plus tard, une nouvelle délégation de jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices a été reçue à Matignon pour y rencontrer Schwan Badirou Gafari, le conseiller aux services financiers et aux affaires financières multilatérales de la Première ministre Elisabeth Borne. Bien installés dans la « Salle de bal », nous avons pu aborder avec franchise les différents points qui allaient être sur la table lors du Sommet et comprendre la position française. Si la France doit poursuivre ses efforts en matière d’aide financière allouée aux États africains, l’Elysée profitera également de ce Sommet pour faire pression sur les États à revenu élevé afin que davantage de DTS soient réalloués aux États à faible revenu.
Les jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices à la rencontre de différents ministères
C’est ensuite à Bercy, au ministère de l’Economie et des Finances, que s’est tenu quelques jours plus tard le rendez-vous suivant. Nous avons été reçu·e·s par Audrey Gross, conseillère en charge des affaires européennes et internationales auprès du ministre Bruno Le Maire.
À peine sorti·e·s de ce rendez-vous, nous nous sommes rendu·e·s quelques heures plus tard au MEAE. Dernière étape avant d’atteindre le cœur du pouvoir, cette ultime entrevue avec le conseiller aux affaires juridiques, affaires globales, Nations unies et organisations internationales de Catherine Colonna, Raphaël Dang, nous a donné beaucoup d’espoir. Passé l’émerveillement suscité par la visite des escaliers et des salons du Quai d’Orsay, place à une heure et demie de discussions intenses et enrichissantes. En effet, cet échange aura permis de bien cerner les attentes de la politique étrangère française lors de ce Sommet. Nous avons par ailleurs remis à M. Dang une lettre ouverte signée par l’ensemble des jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices de ONE en Europe, dans laquelle nous demandons à Catherine Colonna de renforcer la politique de solidarité internationale de la France.
Ce Sommet représentait donc une occasion unique d’entamer des discussions autour d’une internationalisation de la TTF, de tirer l’ambition de réallouer 100 milliards de dollars de DTS aux pays à faible revenu et de jauger le degré d’engagement des BMD.
…et du Président de la République
Et nous ne nous sommes pas arrêté·e·s là !
Quelques jours avant le Sommet, trois Jeunes Ambassadrices accompagnées de notre directrice, Najat Vallaud-Belkacem, ont été invitées à l’Élysée pour parler solidarité internationale et crise climatique avec le Président de la République.
Accueillies au sein de l’impressionnante salle des Ministres, elles ont pu présenter quelques demandes qu’elles souhaitaient voir adoptées lors du Sommet. Alors que l’augmentation des DTS était confirmée, le dégagement de nouvelles recettes grâce à la TTF était moins assuré par les équipes présidentielles qui montraient cependant leur envie de s’accorder sur une taxe internationale, notamment sur le secteur maritime.
Les collaborateurs et collaboratrices qui travaillent sur ce Sommet se sont globalement montré·e·s à l’écoute de nos jeunes Ambassadrices et ont même proposé de réaliser des rencontres régulières pour s’assurer de l’avancée de l’Élysée sur ses dossiers. Bien plus, elles ont également été invitées à participer en personne au Sommet, une invitation que très peu de bénévoles ont reçue.
Enfin, elles ont pu remettre à Emmanuel Macron un livret contenant les 1 800 messages des soutiens de ONE. Ces derniers demandaient notamment au Président de la République d’agir pour la solidarité internationale et lui montraient à quel point l’action de la France est cruciale.
Trois jeunes Ambassadrices de ONE remettent un livret content 1 800 messages au Président Macron
La sensibilisation du grand public en amont du Sommet
L’affiche de ONE dans les rues de Creil © Julie Glassberg
Constatant qu’en dépit de l’importance du Sommet, le public n’était pas suffisamment informé, ONE, toujours avec le soutien de ses jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices, a pris l’initiative d’en expliquer aux citoyen·ne·s les enjeux et les défis.
En amont du Sommet, les Français·e·s ont vu surgir dans leurs villes des centaines d’affiches sensibilisant sur le réchauffement climatique. En invitant ces images dans le quotidien de nos vies, peut-être serions-nous plus à même de considérer que la menace climatique pourrait elle aussi y faire irruption ?
Ces affiches mettaient en scène des animaux de la savane africaine, perchés sur de grands blocs de glace au plein milieu de l’océan. L’image interroge. Que fait une girafe perchée au haut d’une banquise ? En fait, rien du tout. Pas plus qu’un éléphant sur un plateau glacier en proie à une lente mais certaine dissolution. Et c’est bien là le malaise… L’Afrique, qui n’est responsable que de 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre subit de plein fouet ses conséquences. Les sécheresses, par exemple, créent de la famine, forcent le déplacement de populations, exacerbent les conflits… Voilà pourtant une réalité dont nous sommes très peu au fait, mais que nous avons tenu à montrer afin que nous puissions agir ensemble. La vidéo de notre campagne a particulièrement reçu un bon accueil sur notre page Instagram, où elle a fait plus de 70 000 vues en quelques jours.
Des points plus techniques de ce Sommet ont été abordés par nos jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices, par exemple dans un article qui explique les tenants et aboutissants du Sommet ou dans une vidéo sur la réforme attendue des BMD. ONE a également produit des contenus pédagogiques, par exemple sur les enjeux de la justice climatique ou en développant une série de courtes vidéos expliquant les enjeux du Sommet. Enfin, nous avons collaboré avec des influenceuses pour sensibiliser un public encore plus large, avec Plan Cash et Girl Go Green, ou encore en partenariat avec des médias comme Tilt.
Une mobilisation renforcée en parallèle du Sommet
Le jour du Sommet, et pendant que certaines de nos jeunes Ambassadrices y étaient présentes, le reste de nos activistes (certain·e·s venu·e·s spécialement d’Allemagne et du Royaume-Uni pour l’occasion !) ont investi la place de la République à Paris pour attirer l’attention et distribuer des flyers aux passant·e·s afin de les informer sur le Sommet.
Un peu plus tard l’après-midi, toujours déterminé·e·s, nos jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices ont continué leur mission de sensibilisation, cette fois-ci en tenant un stand lors du concert organisé par l’ONG Global Citizen au Champ de Mars à Paris. À travers des jeux et quiz, nos bénévoles se sont laissé·e·s aller à la jovialité du festival, profitant de moments d’échanges et de belles rencontres avec d’autres jeunes, sans omettre de les informer sur les enjeux du Sommet et leur proposer d’agir aux côtés de ONE.
Les jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices de ONE en action en parallèle du Sommet © Vincent Jarousseau / ONE
Une présence accrue dans les médias
À la télé, à la radio, dans la presse écrite ou sur les réseaux sociaux, nous avons été sur tous les fronts. À événement d’envergure, communication d’impact ! Compte tenu de l’importance de ce Sommet pour le futur de la solidarité internationale, il était nécessaire d’assurer une communication de masse à tous les stades de ce sommet : avant, pendant et après.
En amont du sommet, diverses actions de communication dans les médias ont eu lieu. Dans un premier temps, des interviews ont été réalisées par notre directrice Najat Vallaud-Belkacem dans des médias tels que Le Monde, Le Point, RFI, L’Express… C’était l’occasion de rappeler les enjeux du Sommet et de réaffirmer nos attentes d’engagements concrets en faveur du financement de la solidarité internationale.
De nombreuses tribunes ont également été publiées, en partenariat avec ONE, comme celle sur la taxe sur les transactions financières dans Le Monde, celle signée par de nombreux ministres africains ou encore celle rédigée par les jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices dans Euractiv.
Deux jours avant le Sommet, nous avons participé à une conférence de presse inter-ONG, aux côtés de CARE, Oxfam, CCFD-Terre Solidaire, Global Citizen et Réseau Action Climat. La crise du COVID-19, l’augmentation des inégalités mondiales, le recul de la lutte contre l’extrême pauvreté et l’urgente nécessité de refonte de l’architecture financière mondiale ont été tant de sujets qui ont été abordés.
Pendant le Sommet, nous n’avons pas chômé non plus : une vingtaine d’interviews ont été données pendant les deux jours, parmi lesquelles C à Vous et C ce Soir.
Au terme du Sommet, ONE a publié un communiqué afin de dresser un bilan des résultats obtenus. Cette réaction a été relayée par plusieurs médias de renom dont RFI, La Croix, 20 minutes, France Info… Globalement encourageants, mais moindres, les engagements pris restent tout de même insuffisants.
ONE présente à l’intérieur du Sommet !
Les jeunes Ambassadrices de ONE avec le ministre de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire
Le Jour-J, le 22 juin, à Paris, trois jeunes Ambassadrices ainsi que certains membres de l’équipe de ONE ont eu le privilège de se joindre à un auditoire composé de dirigeant·e·s mondiaux, de représentant·e·s du secteur privé et d’organisations de la société civile. Nous avons eu l’opportunité d’assister aux discussions qui ont eu lieu entre les dirigeant·e·s, notamment lors des six tables rondes officielles.
Assister aux dialogues entre celles et ceux qui dirigent des gouvernements, des États ou des organisations internationales était captivant. Ces décideurs et décideuses partageaient leurs perspectives sur le rôle crucial de la finance dans la lutte contre la pauvreté, les inégalités et dans la construction de transitions plus justes. De plus, des discussions approfondies ont eu lieu lors d’autres tables rondes impliquant divers acteurs tels que les ONG, les think-tanks, le secteur privé et les scientifiques.
Au sein de la délégation ONE se trouvait également Adenike Oladosu, une activiste éco-féministe nigériane qui milite pour faire entendre la voix des personnes les plus touchées par la crise climatique. Adenike nous a rappelé que les décisions prises par la communauté internationale ont des conséquences concrètes sur les conditions de vie des communautés les plus vulnérables, soulignant l’urgence de la situation et la nécessité d’agir.
Pour nous, jeunes Ambassadeurs et Ambassadrices de ONE, qui nous mobilisions depuis des mois sur le Sommet et ses enjeux, cet événement représentait une opportunité inestimable de construire un monde plus juste. Un sentiment qui est renforcé lorsqu’en coulisses, on croise dans les couloirs étroits du palais Brongniart le ministre français de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, le Secrétaire Général des Nations unies, Antonio Guterres, ou encore Ursula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne. Le changement semble palpable.
Quelles conclusions lors du Sommet ?
Bien que plus d’une trentaine de pays en développement aient été représentés, seulement quatre pays d’Europe et d’Amérique du Nord étaient présents. Face aux crises mondiales actuelles, l’importance d’une réponse multilatérale inclusive impliquant également les pays développés s’impose.
Toutefois, des avancées significatives ont été réalisées lors du Sommet, notamment en ce qui concerne les DTS. Emmanuel Macron et Kristalina Georgieva, directrice du FMI, ont annoncé la réallocation de 100 milliards de DTS, bien que cela englobe la participation des États-Unis, qui n’a pas encore été approuvée par le Congrès américain. En excluant les États-Unis, le total se situe à environ 81 milliards de dollars, avec des pays comme la France, la Belgique et la Suisse prenant des mesures positives. Cependant, de nombreux pays restent sceptiques jusqu’à ce que les fonds soient effectivement débloqués.
En ce qui concerne la dette, bien que des discussions aient eu lieu, peu de changements majeurs ont été constatés, à l’exception de l’introduction de clauses de suspension de la dette en cas de catastrophes naturelles, soutenue par des nations telles que le Royaume-Uni, les États-Unis, la France et le Canada.
Les débats ont également porté sur les banques multilatérales de développement, avec l’adoption d’une “déclaration de vision” sur l’évolution des financements, l’alignement climat-pauvreté et le renforcement de la mobilisation des financements privés. Janet Yellen, Secrétaire au Trésor des Etats-Unis, a appelé à la libération de 200 milliards de dollars sur dix ans, soutenue par le Royaume-Uni et la France. Cependant, certains désaccords ont émergé, notamment sur les promesses tenues, comme celle des 100 milliards de dollars à allouer pour le financement de la lutte contre le changement climatique.
Et maintenant ?
Bien que ce Sommet historique soit terminé, notre engagement ne s’arrête pas là. Le véritable défi consiste maintenant à garantir que les discussions et les engagements nés de ce Sommet se traduisent par des actions concrètes et des mesures efficaces. C’est en poursuivant nos efforts, en maintenant la pression sur les décideurs et décideuses de ce monde et en travaillant ensemble que nous pourrons transformer les promesses en réalité et véritablement façonner un avenir financier plus équitable et durable pour tout le monde. Au sein de ONE, nous allons continuer à encourager la concrétisation de ces discussions, rejoignez-nous !
